jeudi 2 avril 2015

Back from Esxence, the scent of exellence.

De retour de Milan, où je flânait le weekend dernier et où se tenait le salon Esxence, temple du parfum de niche, de distribution sélective, de la parfumerie artistique, de la haute parfumerie et autres dénominations non contrôlées. Un rendez-vous incontournable  mêlant parfumeurs, marques, revendeurs, distributeurs et passionnés, nez curieux en quête de nouvelles découvertes. Et ma foi il y avait de quoi. 
Je vous épargnerai la flanquée de ouds et de flacons qui brillent de milles feux, j'ai lâchement passé mon chemin, pour présenter deux ou trois choses que j'ai senties, aimées et dont j'avais envie de vous parler. 




Les marques : 

Rubini. Une toute nouvelle marque qui débarque avec un Fundamental racé, et élégant. Plongée dans l'histoire de la famille Rubini de Mantoue qui vend des parfums depuis 80 ans, Andrea le petit fils est un passionné et cela se sent. Il présente une lavande moderne qui évite la fougère tout en s'y référant, avec une note de raisin qui me plait beaucoup, une certaine amertume maquisarde et un fond tranquillement boisé.  

Malbrum : Une marque norvégienne inconnue au bataillon portée par Kristian à l'allure de surfeur australien, qui respire le bonheur de faire ce qu'il aime et de le partager. Un mélange de classicisme "à la française" avec la nature sauvage de la Norvège. Et trois parfums très intéressants que j'ai hâte de pouvoir approfondir et découvrir plus avant : Psychotrope, Tigre du Bengale et Shameless seducer. 

O'driu au rayon complètement allumé. Angelo Orazio Pregoni est un artiste conceptuel, les flacons, les parfums, tout est artistiquement très original, et vous savez quoi : les parfums sont tout à fait sentables et portables. M'ont plu : Peeti le parfum à personnaliser avec quelques gouttes de votre pipi (là, j'avoue, je me contenterai d'être tradi, la golden shower parfumée je ne suis pas sûr) et Eva Kant, très drama queen fleuri épicé aromatique assez bien troussé. 

Aimée de Mars : Après le concept, la traditionel et le naturel. La sympathique Aimée vient de l'aromathérapie, utilise majoritairement des composés naturels et crée des parfums qui du coup ont une âme, de la chair et racontent une histoire. J'ai beaucoup aimé la série Les étoiles d'Aimée et particulièrement Mystique améthyste qui curieusement m'a rappelé Émeraude. Ce qui n'est pas rien. 




Les parfums : 

Rosy, extrait de parfum, Vero Profumo. D'abord c'est toujours une joie de croiser Vero. Au détour d'un cocktail bondé, entre deux toasts et du champagne, n'est-il pas meilleure occasion de savourer Rosy, cette fois-ci en extrait. Le miel est plus épais, la tubéreuse plus mordante et ronde, ça a du chien comme on disait, de la gueule. J'adore. 


I Miss Violet, The Different Company. Longtemps reléguée au rayon mémère, la petite fleur qui porte le nom de sa couleur sort peu à peu du placard poussiéreux, le débarras aux vieilleries bonbonnières. La voici déshabillée par Bertrand Duchaufour à son meilleur : l' accord cuir violette végétale se fond au fruité velours de pêche et daim avec beaucoup d'élégance. La fille est joyeuse, rayonnante, sage avec un je ne sais quoi de déluré qui lui donne beaucoup de charme. La grand-mère, l’ancêtre  Jolie Madame oubliée dans un coin, sourie de connivence. Oh oui, vous nous avez terriblement manqué ma chère. 


Panorama,  Olfactive studio : Un vert tropical qui respire et vibre. Sur un accord wasabi très intéressant se greffent des notes vertes (je sens du lentisque et c'est très bien !) et une belle note de myrrhe amère et épaisse. A explorer, cette jungle. 


1831, Histoires de parfum : J'ai lu floral aldéhydé et tout de suite mon attention a été captée. Sortir ça en 2015 c'est aventureux, couillu disons-le, et j'admire la prouesse. Parce que le parfum bien que plongé dans l'histoire (et pas n'importe laquelle : Norma, l'opéra est un monument qui convient parfaitement au drame aldéhydé) est bien moderne, avec un poivre rose qui fait briller les yeux en ouverture. Pour la grande dame qui est en vous, les jours avec tiare.   


Arlequinade de Paul Poiret, présenté par l'Osmothèque. Comment dire : j'en ai les larmes aux yeux tellement c'est beau, du temps où la parfumerie s'inventait, on aimait la matière,  le velours, le taffetas, la moire et les drapés soyeux. J'aime tant ces froufrous, ces notes épicées et cette poudre qui vole joyeusement, presque insouciante. Un bijou. 
On ne dira jamais assez le magnifique travail, nécessaire, que fait l'Osmothèque. La passion de ses osmothéquaires, ici Bernard Bourgeois, est un bonheur pour les amateurs d'histoires de la parfumerie comme moi. 
En un mot : merci. 


L'Eau de Madeleine, Au pays de la Fleur d'Oranger. Coup de cœur. Une histoire de souvenir de sa grand-mère pour la créatrice. D'abord j'ai pensé : oh non, pitié pas de gâteau. Et bien pas du tout ! Un bel  encens hyper dosé en résinoïde, entouré de benjoin de vanille et d'un cuir tout en finesse pour le réchauffer encore, éviter l'église vue et revue et m'emporter au loin, vers une Mésopotamie fantasmée, quand on inventait l'écriture. Un encens païen en somme. En fait de madeleine, j'ai du vivre là-bas dans une autre vie.  

  


jeudi 19 mars 2015

Evaluations.



Tous les ans c'est la guerre, le drame, la saison des battle qui démarre.  La tubéreuse Castafiore deluxe siliconée versus la cocotte cosmétique chic, le macho poil frais peigné contre le métroriental gominé : L'Olfactorama commence.  Depuis deux ans j'ai la chance de faire partie des impitoyables jurés qui ont en charge d'élire le haut du panier de la création parfumée et j'ai reçu mon kit à tester : 30 échantillons s'étalent fièrement sur mon bureau.

Cette fois les organisateurs ont poussé la perversité jusqu'à nous proposer des tests en aveugle. Les vaches. Une fois de plus ils ont déniché la crème du meilleur des dix milles sorties annuelles (et je les plains sincèrement d'avoir à sentir toutes ces horreurs pour sélectionner le bon grain qui nous fera pâmer).
Bien sûr on refait quelques connaissances :  la bestiole du joaillier, le chichon de la diva, le fer à repasser, les chaps orange...  En bon vieux schnok parfumé  j'en entends qui se disent ( mais pas moi bien sûr) "Oh mon dieu, si ça se trouve je vais voter pour un Cerruti. " L'angoisse. 

Cette année encore une abominable kraken s'est glissé dans la sélection, exprès pour friser mon nez délicat, un mystérieux total look Adidas fluo qui réussi l'exploit de réunir tout ce que je crois détester dans un parfum. Et puis une découverte pour compenser, un coup de cœur qui porte le nom de code U3. Je brûle de découvrir sa véritable identité. 

Il y a des choses que je n'aime pas vraiment, mais dont je ne peux nier la maestria. Il y a des évidences, des adorations. Beaucoup de doutes, il faut choisir, éliminer.  On soupire, on râle, on lève le sourcil, le poing parfois, on pousse des hmmm de plaisir, on tergiverse, on chipote, on débat passionnément pour au final élire la beauté, le cru annuel, la virtuosité, l’enthousiasme et la renaissance d'une gloire déchue. 

 Bref, je m'éclate  et je retourne illico faire mes devoirs. 





Photo Helmut Newton.