lundi 15 octobre 2012

Rêve d'Ossian, Oriza L. Legrand.




L'antique maison de parfum Oriza Louis Legrand officia dès le début du 18ème siècle, parfumant princes,  rois ou empereurs et participant à l'avènement de la parfumerie moderne, avant de s'éteindre dans les années 30. 
Elle renait aujourd'hui de ses cendres en présentant quatre  parfums, inspirés de la gloire d'antan bien sûr: Rêve d'Ossian (1900), Relique d'amour (1910), Oeillet Louis XV (1909) et Déjà le printemps(1920).
Des quatre c'est Rêve d'Ossian qui m'a le plus interpellé : au premier abord en le reniflant distraitement lors des journées Rives de la Beauté à la boutique Jovoy, j'ai, je l'avoue eut un mouvement de recul, pris par surprise.

Une ouverture surprenante, des notes de pin aériennes un peu grasses et métalliques (aldéhydes et terpinéols?), de vieux bois et de mousse sur pierre humide mais qui se réchauffent en douceur, insufflant un  curieux élan  aux parfum qui aurait pu virer rapidement à la fougère classique et ennuyeuse. 
Très vite des noms comme benjoin, oliban, élemi résonnent en tête, et l'on songe aux onguents, aux baumes et aux bois chauds qui parfumaient les cours d'antan. 

Une odeur d'armoire ancienne, de linge flottant, de draps de lin propre, de maison de campagne, les matières se fondent  sans se départir de cette impression quasi mélancolique  d'aérien. Une odeur de papier chaud légèrement ambré, de reliure en cuir sec presque poussiéreux. Une impression de lande à l'automne également, d'ostie sur le bout de la langue. Autant d'images qui me viennent à l'esprit en le sentant, revenu au calme de mon antre parfumée.




En rêvant d'Ossian, j'entends les chants islandais antiques d'un scalde hirsute, besace en bandoulière et robe de bure sillonnant de mystérieuses forêts en discourant aux fées et autres farfadets facétieux. Au loin des corneilles en comité bavassent dans les peupliers et j'imagine sans mal Goethe au coin du feu frissonner en lisant les histoires d'amour impossible des dieux nordiques, de nains barbus et d'elfes éthérés.
Et même si l'on sait bien qu' Ossian n'a probablement jamais existé et est le fruit de l'imagination d'un poète britannique du 18ème siècle, le souffle ossianique m' emporte comme il emporta les romantiques dans son courant. 

Et  plus touchant encore, Rêve d'Ossian  me parle d'une parfumerie d'antan, surannée, le temps où des maisons comme Houbigant créaient des parfums du nom de Bois dormant, Au matin,  et où Mlle Chanel n'avait pas encore jeté la parfumerie dans l'abstrait et même, où les classiques fougères, chypres et orientaux n'avaient pas encore été inventés. Une parfumerie figurative où les premières matières synthétiques faisaient timidement leur entrée. 

Vraiment un beau travail de résurrection de cette maison totalement oubliée, les parfums sont tous de qualité et les flacons magnifiques, ils sont à la fois modernes dans leur traitement et complètement fidèle à l'esprit d'époque: une vraie réussite.


Photos: tableau d'Ingres Le rêve d'Ossian 1813; publicité 1906. 


 

5 commentaires:

  1. Oui beaucoup de succès pour Oriza L. Legrand, les 4 flacons sont superbes et les parfums magiques, j'avoue que j'ai une préférence pour Reliques d'amour.... Il faut absolument les découvrir ! Longue vie à la maison Oriza.

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    1. J'aime beaucoup Reliques d'amour et Œillet Louis XV également. Le seul que je n'ai pas senti c'est Déjà le printemps. Mais effectivement en les sentant, on ne peut que se dire: :longue vie!

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    2. Merci à Anatole et aux "parfumistas" dont les encouragements nous touchent sincèrement.
      Nous espérons donner à Oriza L. Legrand la légitimité qu'elle avait jusqu'alors, parmi les grandes Maisons de Parfums.
      Encore merci.

      Oriza L. Legrand

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  2. Belle description... Ce parfum est introuvable chez Jovoy où alors caché dans un coin de la quatrième dimension. Par ailleurs, Rêve d'Ossian, je l'avais découvert dans une toute petite boutique, non loin de L'île Saint-Louis. En fait, ce parfum c'est l'encens d'une église orthodoxe, capturé et mis en flacon. Superbe !

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    1. Merci Ankalogon, je réponds tardivement: les parfums Oriza Legrand ne sont plus disponibles chez Jovoy mais ils le sont à présent dans la toute nouvelle boutique Oriza 18 rue Saint-Augustin, Paris 2ème.

      Et oui, il est superbe!

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