jeudi 31 janvier 2013

Cartier: L'heure vertueuse


Il y a des billets qu'on pense écrire mais qu'on repousse,  intimidé sans doute parce que l'on a à faire à forte partie, un mythe par exemple sur lequel il est difficile de rajouter un mot qui pourrait être de trop. Parfois aussi c'est l’extrême nouveauté et la maestria qui me cloue le nez. J'ai tellement d'admiration pour le travail de certains parfumeurs et certains parfums qui me touchent profondément qu'il est difficile d'en parler et de mettre des mots. Je n'aborderait sans doute donc jamais le cas de l'Heure fougueuse  parce que finalement je n'ai sans doute rien à en dire, simplement à l'habiter et y vivre. Mais l'occasion de la sortie d'une nouvelle heure de Cartier m'incite à livrer ici ma joie intense à découvrir une nouvelle facette de cette collection qui répond parfaitement à l'idée qu'on peut se faire d'une Haute Parfumerie. 


Ça commence par une brassée d'herbe fraiche coupée à la faux:  luzerne, trèfle, mêlée de menthe pouliot, de mélilot et quelques fleurs de coquelicot qui trainent.
Vert vert vert,  décoiffant, rafraichissant, le croquant, la sève et le jus de blé.
Puis la lavande, plutôt lavandin ou même aspic, la sauvage  qui pousse à flancs de coteaux, plus camphrée et herbacée que sa cousine noble, tige  plutôt que fleur donc.  Et les terpènes magiques des aromathérapeutes aux doux noms en ol: cinéol, linalol, terpineol font la farandole avec les notes d'herbes verte coupée (cis 3 hexenol en tête, stemone pourquoi pas pharaonne).
Forcément c'est le printemps, la Corse juste après l'ondée, quelque chose là-dedans me rappelle la feuille fraiche de l'immortelle, subtilement épicée voire anisée ou la feuille de tomate par moments.
Ensuite un effet un peu cotonneux assouplit  ce qui aurait pu virer jardin des aromates, la note verveine et son côté citron confit dure et fruite un peu le tout, une touche  fruitée qui tend vers la rhubarbe d'ailleurs. Un joli contraste entre l'amer des herbes et l'acide du fruit. 

C'est une Cologne ultra moderne élevée au rang de parfum, anoblie dirait-on parce que cette heure vertueuse est bien plus qu'un simple sent-bon.
Soit  la modernisation  d'un accord hyper classique, la lavande vanille alla Pour un Homme: Au diable vanille, civette qui salissaient et pervertissaient Jicky, l'heure n'est pas à la petite vertu, c'est du propre que l'on veut. Ou, Eau fraiche années 70 qui a perdu sa mousse et son boisé pour rester limpide et juteuse tout au long. Bref du grand art encore une fois, dans cette collection époustouflante, par une Mathilde Laurent décidément sorcière, de celles qui trop talentueuses, en d'autres temps auraient fini sur un bucher. Mais les temps ont bien changé et la délicatesse, la sensibilité peuvent s'exprimer sans ambages.


Photo: herbe vert rosée.


2 commentaires:

  1. j'aimerais bien la comparer avec ta Merhzine :)
    Nyneve

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    1. Bonjour Nyneve, j'en parlerais bientôt.
      Pour la comparaison, je crois qu'ils n'ont pas grand chose en commun, les notes vertes ne sont pas les mêmes et bien sûr la maitrise de Mathilde Laurent est bien supérieure.

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